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L'actu vue par Laurent DECLOITRE

L'actu vue par Laurent DECLOITRE

Les articles de Laurent Decloitre (journaliste et biographe) sur la Réunion et l'océan Indien parus dans Libération, Marianne, Paris Match, l'Express, Géo et la presse nationale.

Publié le par Laurent DECLOITRE
Publié dans : #Articles parus dans l'Express

L'Express du 15 mai 2014. De notre correspondant.

 

Où est passé Camille Sudre ? Le mouvement à la colombe a aujourd’hui disparu de l’échiquier politique réunionnais.

 

SUDRE-Camille-010.jpg« Freedom ne pourrait plus soulever la population, car Camille Sudre ne représente plus rien ». Bertrand Grondin, président de la Fédération des radios associatives de la Réunion, a la dent dure… L’ardent défenseur de l’identité créole se justifie : « Autrefois, il prenait la parole sur ses ondes, aujourd’hui, il se contente de la donner ».

C’est cette confusion entre les ondes et les urnes, après la création de radio Freedom en 1981 et de Télé Freedom en 1986, qui avait consacré le promoteur de « l’égalité sociale » et de « la libre expression » à la tête du conseil régional en 1992. « La liberté de ton avait séduit et renouvelé l’acte politique. Elle avait ouvert un autre rapport, radiophonique et politique, qui ne distinguait pas entre l’auditeur, le citoyen et l’électeur », analyse à l’université de la Réunion le politologue et historien Yvan Combeau. En 1988, Camille Sudre avait échoué aux législatives et aux cantonales, avant de devenir en 1989 l’adjoint du socialiste Gilbert Annette à Saint-Denis. Un maire qui le traitera de « danger pour la démocratie » quatre ans plus tard…

Au final, la carrière politique du médecin se résume à une courte et flamboyante parenthèse. Un an après avoir été élu, à la surprise générale, président de la Région, le 27 mars 1992 avec l’appui du parti communiste réunionnais (PCR), Camille Sudre est déclaré inéligible par le Conseil d’État en mai 1993.

Selon la Commission nationale des comptes de campagne, radio Freedom a consacré 208 heures à promouvoir la candidature de son patron, soit un « avantage » estimé à 520 000 francs (80 000 euros). Trois fois plus que le plafond autorisé ! Aux élections qui suivent en 1993, Camille adoube Margie, dont il est séparé depuis 1987. Margie Sudre remporte le scrutin et recrute son compagnon de route au cabinet… Mais celle qui deviendra secrétaire d’État à la Francophonie du gouvernement Juppé prend un virage à droite ; le mouvement Freedom implose. Camille fait le grand écart et échoue une nouvelle fois aux législatives.

« Simple adjuvant »

En 1998, il n’obtient plus que 5 sièges (contre 17 en 1992) ; l’homme, toujours habillé de blanc, devient pourtant le premier vice-président de Paul Vergès (PCR), poste qu’il conserve jusqu’en 2010. Entretemps, il a renoncé à présenter sa propre liste et est devenu un « simple adjuvant », pour reprendre l’expression d’Yvan Combeau, en intégrant la liste Alliance animée par le PCR. Aujourd’hui, le leader de Freedom, conseiller régional dans l’opposition à la majorité de droite, laisse un bilan mitigé de sa mandature. Pour Idriss Omarjee, directeur de cabinet de Paul Vergès, « Camille Sudre a toujours défendu avec loyauté des valeurs progressistes. C’est un homme de conviction qui tient ses engagements ».

Les anciens colistiers de Freedom ont une toute autre lecture de l’histoire. Jasmin Moutoussamy, l’ancien bras droit de Camille Sudre à la radio comme au conseil régional, estima dans le Journal de l’île s’être « fait avoir ». Un autre élu évoque les « illusions perdues », un dernier se dit « dégoûté »… L’intéressé tentera-t-il de prolonger ses 22 ans de mandat aux élections régionales de l’an prochain ? Le fait que Freedom n’ait présenté ni liste, ni candidat aux dernières municipales, ne préjuge de rien. Camille Sudre serait « très attaché » à son poste à la Région.

Laurent DECLOITRE

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